J'écris, tu écris, il ou elle écrit...

Et si nous apprenions à douter…

Le confinement nous apprendrait-il les vertus du recueillement et de la réflexion ? Car nous n’y étions pas habitués dans nos anciennes vies, celles de l’agitation, de la dissipation, de l’information vraie ou fausse.

Alors, si nous réussissons à nous éloigner un peu de nos écrans, nous pouvons tenter de questionner le concept du vivre ensemble, notre rapport à l’autorité, à la science, à la responsabilité individuelle, à la responsabilité collective. Nous en reparlerons le moment venu, mais il nous faudra sans doute désormais mieux nous conduire intelligemment collectivement. Et c’est sans doute là que résidera la plus grande difficulté : dans le « collectivement ». Car notre avenir dépend directement des comportements que tous, nous adoptons aujourd’hui. L’humanité ne survivra que si nous prenons soin collectivement de notre unique planète.

Alors, réussirons-nous la révolution de notre façon de mieux penser ensemble ?

Je propose de commencer par identifier les lieux communs, ces opinions, paresses intellectuelles, afin de mieux les éliminer. Exemple en ce temps de lutte contre le Covid-19 : « Les scientifiques ne sont même pas d’accord entre eux sur la façon de procéder ».

Eh bien oui, et c’est plutôt normal, car face à une menace nouvelle, inconnue, c’est le signe que la démarche scientifique est en route.

Si on regarde d’un peu plus près l’histoire des idées scientifiques, la manière dont se construit la connaissance, on s’aperçoit que cette connaissance se bâtit par le tâtonnement, la controverse, la contradiction, par l’élaboration de théories qui font autorité jusqu’à ce que d’autres théories viennent bousculer les premières, les prolonger ou les invalider.

La première pensée véritablement scientifique au sens de la science moderne fut celle de Galilée en 1604. Il s’agit de la loi de la chute des corps. Depuis Aristote, en effet, on enseignait que les corps lourds tombent plus vite que les corps légers. Parce que c’est conforme à l’observation. Faites l’expérience avec une boule de pétanque et une balle de ping-pong. Laissez-les tomber en même temps et vous verrez que la boule de pétanque touchera le sol la première.

Galilée fut le premier à se demander si cette loi était vraie et réussit, par une expérience de pensée, à démontrer que non : supposons que cette loi soit vraie et tirons-en toutes les conséquences. Attachons les deux objets à l’aide d’une ficelle. Nous fabriquons ainsi un système plus lourd que la boule de pétanque toute seule et imaginons sa chute libre. Ce système, plus lourd, devrait tomber plus vite que la boule de pétanque. Mais en même temps, la balle de ping-pong, plus légère, devrait tendre la corde, faire parachute, et ralentir l’ensemble. Qui devrait donc tomber moins vite.

Voici donc un système qui tombe plus vite et moins vite que la boule de pétanque. Paradoxe.

La loi d’Aristote est donc fausse et tous les corps doivent tomber à la même vitesse dans le vide, contrairement à ce que l’on observe sur terre. Il nous faut alors réinterroger l’observation et comprendre que si nous voyons les corps tomber à des vitesses différentes, c’est que d’autres forces invisibles viennent agir comme la résistance de l’air, la poussée d’Archimède.

Eh bien pendant cette période, les scientifiques n’étaient pas d’accord entre eux et c’est de leurs débats, de leurs études, de leurs expériences – Galilée a réalisé de nombreuses expériences de chute des corps dans l’air, dans l’eau, dans la mélasse, etc.– que la connaissance a pu progresser.

Oui, les scientifiques d’aujourd’hui étudient, expérimentent, testent, débattent, confrontent leurs idées et ils prennent parfois à témoin les opinions publiques. Alors si nous voulons faire progresser notre intelligence collective, essayons de comprendre et apprenons à réfléchir correctement, à relativiser nos certitudes, à douter de ce que nous croyions savoir.

Aristote lui-même le disait déjà trois cents ans avant Jésus-Christ « Le doute est le commencement de la sagesse ».

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